L’expression “option obligatoire” est non seulement impropre (puisqu’une option, par nature, ne doit pas être obligatoire), mais il s’agit surtout d’une pratique qui irrite de plus en plus de monde dans l’univers du voyage … à commencer par les voyageurs, les autorités publiques et depuis quelques mois, le boss d’Airbnb en personne ! Cette semaine, ce dernier a annoncé la survenue d’un “petit bouton” qui pourrait, à terme, tout éparpiller “façon puzzle” comme disaient les tontons flingueurs …
Il y a quelques mois déjà (lire notre article de février dernier), nous annoncions que 2023 serait l’année de la “fin des suppléments” … et nous ne croyions pas si bien dire. Ces frais – qu’il s’agisse des frais de ménage, de la location de linge, du wifi, etc … – sont au coeur de toutes les attentions, qu’il s’agisse des propriétaires eux-mêmes, des voyageurs, des autorités et, désormais, des big boss de la distribution en ligne. En 2023, voire en 2024, les “options obligatoires” devraient donc être “éparpillées façon puzzle” …
Ainsi, faire du ménage une option obligatoire risque de n’être plus qu’un vieux souvenir d’ici à quelques mois … Cette pratique, très courante dans le milieu des locations de vacances, n’est plus en cour et chez les voyageurs et chez les “grands décideurs” du tourisme, à commencer par le big boss d’Airbnb en personne, Brian Chesky.
À la question de Skift de savoir si “les frais de ménage pouvaient être supprimés sur Airbnb ?”, Brian Chesky a déclaré “Essentiellement, oui” !
Cette déclaration fait monter d’un cran la tension des propriétaires sur la mort certaine (et proche) des fameuses “options obligatoires”. Car, comme annoncé, l’an dernier, Airbnb a décidé de faire le ménage sur les “options obligatoires” (ou, en d’autres termes, les “suppléments”) qui créent une irritation croissante chez les clients de la plateforme.
D’ailleurs, en novembre 2022 déjà, Brian Chesky, ouvrait les festivités en tweetant à ses fidèles clients: “Je vous ai entendu haut et fort – vous avez l’impression que les prix ne sont pas transparents. À partir de décembre (NDLR: 2022), nous commencerons à déployer l’option permettant d’afficher le prix total dans les pays où les exigences d’affichage des prix ne sont pas en vigueur. Le prix total comprendra tous les frais avant taxes et sera affiché dans les résultats de recherche, ainsi que sur la carte, le filtre et la page de liste“.
Ce “petit bouton” a fait son entrée, comme prévu en décembre dernier, sur Airbnb et lorsqu’il est activé, l’utilisateur ne voit que le prix total, frais compris, et non plus un prix “de base” qui augmente ensuite au moment où vous êtes prêt à le réserver. A ces étapes ultérieures, en effet, viennent se rajouter les frais divers, les taxes … et les frais de dossier Airbnb; ce qui fait rapidement grimper le prix “de base” … et la frustration (sinon la colère) des clients.
Compte tenu du succès de ce “petit bouton”, non seulement son affichage sera généralisé sur tous les pays où opère Airbnb mais, en plus, l’option sera elle-même cochée par défaut … là aussi, donc, une forme d’option “obligatoire” comme un retour à l’envoyeur.
260.000 offres “dans le rang”
Le succès de cette “option” est tel que Airbnb annonce, d’ores et déjà, qu’il sera généralisé et positionné en mode “prix global” de sorte que le “client ne verra jamais de frais de ménage. Cela sera intégré au tarif journalier, tout comme un hôtel sans frais de nettoyage“, a déclaré Brian Chesky au Skift Forum.
Par ailleurs, selon les dernières annonces du big boss d’Airbnb, la plateforme devrait aussi donner la priorité d’affichage (le classement) aux adresses qui proposeront un prix “global” sans distinction des frais de ménage (ou d’autres frais comme la location du linge de literie, par exemple, ou encore des serviettes de bain).
L’idée est de ne pas valoriser ceux par qui le scandale arrive; c’est-à-dire, les propriétaires qui affichent un “prix de base” bas qui s’épaissit, au fur et à mesure du parcours de réservation, d’options “obligatoires” plus onéreuses les unes que les autres … D’ailleurs, le message aurait déjà été reçu par plus de 260.000 propriétaires qui, selon Airbnb, auraient déjà supprimé ces fameuses “options obligatoires” de leur tarification (pour les intégrer de facto dans leur prix “à la nuitée” ou “à la semaine”).
Outre le fait que ces “options obligatoires” sont quelques peu “datées” et hors des pratiques commerciales courantes dans l’univers du voyage, le patron d’Airbnb veille aussi à anticiper une éventuelle réglementation dont l’application pourrait s’avérer bien plus “tonique”. Aux US, notamment, des débats agitent la classe politique, Joe Biden en tête, pour mettre un terme pur et simple à ces pratiques que les consommateurs détestent. Le “grand ménage du ménage” est donc pour bientôt !
L’option (obligatoire) du ménage en première ligne
Car l’exemple le plus frappant de ces “options obligatoires” est bien le ménage, facturé en supplément par les propriétaires à leurs locataires (de courte durée). Si ce coût est historiquement et logiquement inclus dans le prix à la nuitée facturé par un hôtel ou une maison d’hôtes, il est généralement optionnel (mais, trop souvent, obligatoire) dans les locations de vacances …
Les propriétaires partent du principe que la gestion du ménage est quelque chose de compliqué : il y a, d’abord, les bailleurs qui ne se trouvent pas sur place et qui, dès lors, n’ont pas les moyens de venir faire et l’état des lieux (au départ et à l’arrivée) et donc, encore moins le ménage. Tout se passe à distance et, depuis quelques années, les boitiers de remises de clés (après avoir tapé un code) sont devenus la règle chez de très nombreux loueurs. Dans ce cas, le ménage incombe au vacancier en espérant que ce dernier y mette le “coeur” nécessaire pour éviter le moindre désagrément aux vacancier suivant …
Les défauts de ménage étant légion et les avis ulcerés (des vacanciers suivants) de plus en plus nombreux, les propriétaires ont donc rendu le ménage obligatoire … et donc, payant !
Le business du ménage
C’est là qu’interviennent les sociétés spécialisées (ou, plus artisanalement), le ou la vacataire de ménage (un “local” connu du propriétaire ou popularisé par le bouche-à-oreille des propriétaires) qui va, finalement, intervenir sur le local pour s’assurer qu’il soit rendu en état de propreté impeccable au prochain client.
Mais, évidemment, cette intervention a un coût et, là aussi, le propriétaire ne veut pas qu’elle vienne augmenter la valeur de sa location … d’où le fait de présenter cette prestation comme “annexe” et finalement, obligatoire.
Sauf que l’organisation du ménage n’est pas chose facile quand on n’est pas un loueur de métier et que l’on a du mal à compter sur un prestataire en particulier. Aux US, par exemple, ces prestataires sont “ubérisés” (payés à la tâche) et souvent très mal payés; ce qui a, souvent, des conséquences sur la qualité de la prestation: de la méthode de travail jusqu’aux produits (souvent cheap) employés et qui ne garantissent pas de rentrer dans un lieu de vacances hors de tout soupçon de saleté.
Et puis, la prise en compte de ces frais et leur intégration dans le prix final reste complexe pour des loueurs peu expérimentés : combien facturer pour une semaine ? combien de fois envoyer le prestataire de ménage sur place pendant ce délai ? et quid du prix pour une seule nuitée ou un weekend quand on était habitué, jusque là, à ne loueur que sept nuits au minimum, etc ?
Cette difficulté a d’ailleurs fait le bonheur des “conciergeries” qui ont essaimé sur l’ensemble des destinations : en proposant du tout compris aux propriétaires (dont la gestion du ménage), ces dernières ont gagné des parts de marché considérables en séduisant des propriétaires dépassés par toutes ces nouvelles contraintes.
Et ce n’est pas fini … car, avec les changements fulgurants et irréversibles liés à la réservation en ligne (qui ont entrainé des mutations profondes chez les voyageurs et les distributeurs), les loueurs “traditionnels” ont de plus en plus de mal à se mettre à la page et donc, à afficher des prix “tout compris” là où, historiquement, ils ne raisonnaient que par “prix de base” puis “options obligatoires” …
Car c’est bien là que la bât blesse … pour un voyageur, une option ne doit pas avoir de caractère obligatoire et si c’est le cas, alors, mieux vaut ne pas la détailler et l’intégrer directement dans le prix de la nuitée …
Et cette évolution fait le bonheur des concurrents : pour un hôtel ou une maison d’hôtes (avec, par conséquent, un prix “tout compris”), l’émergence massive d’offres locatives “bon marché” (en apparence) a grandement bousculé le marché. En affichant des prix “de base” plus bas, les locations de vacances sont rapidement apparues comme concurrentielles et ont détourné une part croissante de leur clientèle … Au premier abord, les voyageurs ont trouvé des prix attractifs (car amputés d’une large part de leur composante) et ont favorisé l’émergence de ce marché jusque là relégué aux sites d’annonces.
La fin d’un anachronisme ?
Cependant, avec l’émergence de la réservation en ligne qui impose d’afficher prix et disponibilité en temps réel, les pratiques tarifaires (reposant sur des “options obligatoires”) se sont montrées, dans un premier temps, tenaces … jusqu’au craquement des voyageurs (les forums et les avis négatifs pulullent sur le sujet), donc les autorités … et maintenant, les patrons des grandes plateformes.
Face à cette montée de température, dans un premier temps, les propriétaires (et certains sites spécialisés) ont donc cherché à rendre cette “option” plus douce en ne la faisant apparaître qu’à la fin du processus de réservation: ==le client voit un prix de base (par exemple, 500€ la semaine), ce qui rend l’offre attractive, puis, au moment de finaliser, s’additionnent des options “obligatoires” (comme le ménage) qui peuvent faire grimper l’addition de quelques dizaines ou centaines d’euros supplémentaires; ce qui est un véritable “irritant” pour le voyageur (qui n’aime, mais alors pas du tout, cela) et pour la plateforme de distribution (qui perd souvent, à cause de cette “mauvaise” surprise) la réservation et donc, la commission. Et donc, un “acte illégal” pour les autorités publiques … qu’elles soient américaines ou européennes.
Car, en période de transparence tarifaire et d’inflation chronique, la pratique parait d’autant plus inappropriée. Pour Joe Biden, par exemple, (Oui ! le Président des US), “les suppléments doivent être inclus dans le coût annoncé de la chambre car ceux-ci ne sont, en aucun cas, facultatifs … Ne pas les inclure est frauduleux et trompeur !” Il n’en fallait pas plus, par conséquent, pour que de nombreuses autorités (et pas seulement aux US) se saisissent du sujet et multiplient les annonces quant à de futures mesures radicales, comme leur disparition pure et simple. Ce sera aussi le cas en Europe si l’on en croit les débats engagés aux différents niveaux de décision …
La pratique des “options obligatoires” est donc clairement anachronique avec les usages contemporains de la réservation en ligne: lorsqu’un voyageur achète un billet d’avion ou une nuit d’hôtel, ou encore une place de cinéma, le ménage de sa place ne lui est pas facturé … tout est inclus dans le prix et le consommateur considère que le ménage est une prestation aussi courante que la mise à disposition de l’électricité, du wifi ou encore de l’air conditionné. Et ce, d’autant plus que, mises bout à bout, toutes ces “options obligatoires” ont tendance à rendre le prix de la location finalement peu attractif par rapport à une nuit d’hôtel ou de maison d’hôtes ou tout est compris … De quoi faire dire que la pratique du “vrai prix” risque de saper sérieusement l’image de compétitivité des locations de courte durée versus les hébergeurs professionnels que sont les hôteliers, les propriétaires de maisons d’hôtes, de gîtes ou de campings (qui, de leur côté aussi, réflechissent à leur évolution rapide sur ce sujet) …
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Airbnb va lancer un fonds Solidaire : Objectif ? Aider les personnes aux revenus modestes à partir en vacances. Cette initiative sera lancée sous la forme d’un fonds solidaire créé et financé par Airbnb à compter de l’été prochain et jusqu’aux prochains jeux olympiques qui se tiendront en France en 2024. Airbnb s’adossera, pour cela, à des initiatives lancées par des associations et des collectivités locales pour répondre au défi d’aider les 4 familles sur 10 qui ne partent jamais en vacances. Cette initiative a également vocation à repondre à l’appel solidaire lancé par Olivia Grégoire, la ministre du Tourisme, qui milite pour un tourisme plus inclusif dans notre pays.